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Un Yes qui veut dire non...
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En jouant la
carte de l'humour radical, les Yes Men se sont imposés en cinq ans
comme des opposants résolus et pertinents à l'ultra-libéralisme
ambiant. C'est la même carte qu'ils ont utilisée pour s'introduire sur
la scène gay, en s'en prenant à un des membres les plus réacs de feu le
gouvernement Raffarin qui a saisi la justice. Rencontre avec Andy
Bichlbaum, un Yes Men à l'homosexualité offensive…
Par Julien Picquart
Yes Men : sous ce nom de code se dissimule un groupe de cinq activistes
américains qui, depuis 1999, dénoncent de façon radicale et percutante
le libéralisme économique ambiant. L'Organisation Mondiale du Commerce,
les décideurs économiques, les boursicoteurs se sont ainsi empêtrés
dans leurs canulars imparables visant à dénoncer et "démasquer
l'imposture néolibérale" (selon le titre du livre hilarant et pertinent
dans lequel ils reviennent sur leurs actions d'éclat) (1). Jusqu'à il y
a peu, l'homosexualité ne faisait pas partie de leur horizon militant
malgré celle, affirmée, de l'un des fondateurs du groupe, Andy
Bichlbaum. En 2002 pourtant, ils y mettent un pied à travers un faux
communiqué attribué à Christian Jacob, alors ministre délégué à la
Famille du gouvernement Raffarin (2), dans lequel celui-ci fait
pêle-mêle l'éloge de l'émission "C'est mon choix", parle des homos
comme d'une "population bigarrée" et s'en prend au PaCS. Relayé en
toute bonne foi par le site internet de "Têtu", ce faux communiqué va
engendrer une véritable affaire avec la mise en examen de deux des
responsables du journal et des injonctions à l'éditeur des Yes Men…
Aujourd'hui, l'affaire suit son cours, ce qui explique la prudence non
dénuée de second degré d'Andy Bichlbaum dans l'entretien qu'il nous a
accordé…
Comment est née l'idée du faux communiqué sur Christian Jacob, ministre délégué à la Famille, en 2002 ?
Je ne sais pas. Un groupe d'activistes s'est approché de nous et nous a
demandé d'héberger le site et de les aider à envoyer le communiqué
anonymement. Puisqu'on l'a trouvé bien, on l'a fait avec enthousiasme.
Pourquoi et comment ils ont trouvé cette idée, je l'ignore, mais elle
est belle.
Comment avez-vous réagi à la mise en examen de la journaliste de "Têtu", Judith Silberfeld ?
Cela a démontré le bien-fondé du communiqué en prouvant l'idiotie d'un gouvernement qui n'a que ça à faire.
Pourquoi avoir annoncé en avril 2005, que vous aviez joué un rôle dans cette affaire ?
Parce que je me trouvais, à ma grande surprise, poursuivi par la
justice française. Ce n'est pas une république bananière, tout de même !
Pourquoi si tard ?
Eblouissant et surprenant que ça continue - on croyait l'affaire close
après la mise en examen de la journaliste. Là, il fallait dire quelque
chose....
Avant cette affaire, vous vous intéressiez plutôt aux questions
économiques, aux effets de la mondialisation pas aux questions de
société, y aurait-il un lien dans la lutte contre le capitalisme et
celle contre l'homophobie ?
Eh bien, le milieu gay, dont je fais partie, est malheureusement devenu
juste un autre segment du marché, sans aucun contenu politique. Au
début, les homos s'alliaient avec les autres "marginaux" pour lutter
contre les dérives de la société. Avec le grand succès de Gay lib' et
notre acceptation et notre absorption par le marché, tout cela est fini
: maintenant ce n'est que nous pour nous.
Votre activisme ne contraste-t-il pas avec les méthodes d'actions plus douces, plus légales du monde associatif homo français ?
Hein ? Désolé, mais je ne peux pas m'empêcher de penser à Act-Up,
grande source d'inspiration pour tous les mouvements contestataires,
inventeurs de méthodes et d'actions très fortes, brillantes, et tout
sauf douces. Vous allez me dire que ces grands activistes français et
autres qui ont si souvent été menottés, qui ont été mis si souvent en
garde-à-vue, l'ont été pour des actions "douces" ? Eh bien non, pas du
point de vue de la police ou de la justice, en tout cas. Mais en même
temps, qu'y a-t-il de violent dans notre communiqué ? Il était bien
plus doux que les propres paroles de Christian Jacob, non ?
A LIRE AUSSI :
CANULAR : CHRONOLOGIE D'UNE AFFAIRE
PORTRAIT : ANDY BICHLBAUM
LIVRE : LE PETIT YES MEN ILLUSTRÉ
(1) Les actions des Yes Men ont également fait l'objet d'un
excellent documentaire sorti en salles le 1er avril : "The Yes Men".
(2) Depuis, l'ex-syndicaliste agricole Christian Jacob a pris le
portefeuille de la Fonction publique dans le gouvernement Villepin.
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